C'était une de ces matinées de dimanche pluvieux, où j'avais juste envie de trainer dans mon lit et me laisser mourir … et ce qu'on fait quand on veut se laisser mourir , on navigue sur facebook… (FML)
Je tombe donc sur une page de danse "let's dance with Aïcha", je vois qu'un pote l'a likée, je l' appelle :
- What's up with this Aïcha? pourquoi elle est canon? pourquoi elle a un beau corps? tu la connais perso? pourquoi elle a l'air de kiffer la life?
Lui la tête toujours dans le cul : non je ne la connais pas perso, mais oui elle est talentueuse, et non aucune idée pour son corps…. ça va ton régime Dukan???
Moi: bon , je pense que je vais aller la voir , elle m'intéresse
Lui: attention elle se la pète ( traduisez cette phrase en morrocan)
Moi: bah tu la connais pas perso ou tu la connais perso daba??
Lui: non, mais c'est ce que je déduis….
La conclusion des marocains de le3ya9a mérite un livre …
bref j'ai écrit à Aïcha,
une semaine après nous nous retrouvions dans un café à Bastille ,
J'ai vu arriver une jeune femme, un bout de crâne rasé, en tenue de sport, grand sac, et grande classe ,
elle m'a souri
On s 'est pris dans les bras et on a passé 3h à parler du Maroc, d'elle, de moi, de nos projets d'avenirs et nos visions de la vie…ça, et de mes problèmes de poids, mais ça , on en reparlera..
Aïcha est une jeune femme de 23 ans, débordante d'énergie et d'humour, ce genre de nanas à double tranchants : soit on s'identifie à elle et elle devient la bonne copine, soit on la jalouse et on la déteste, pas de juste milieu !
J'adore ce genre de personnes, ce genre de rencontres, où on se retrouve pour 30 minutes, et on oublie le temps passé, où personne n'est mal à l'aise et où on a l'impression de s'être toujours connues…
cette boule d'énergie, m'a scotchée par sa vision de la vie, des relations , des gens… comme quoi la maturité n'est pas du tout une question d'âge… à 23 ans on peut déjà avoir une vision précise de qui on est, de ce qu'on veut et de là où on va , il suffit de se poser les bonnes questions, et de ne surtout pas oublier d'où l'on vient ….
Elle a beau jonglé entre ses études en communication, ses cours de danse , scènes parisiennes, comédies musicales et spectacles, elle ne se voit pas finir sa vie en France, beaucoup moins à Paris, elle compte prendre ce qu'il y a à prendre, apprendre ce qu'il y a à apprendre et rentrer ouvrir sa propre école de danse à Casablanca, "Rendre la danse accessible à tous"! j'avais beau trouver cette idée brillante, l'égoïste en moi ne comprenait pas qu'on puisse lâcher une vie à paris quand on est jeune et danseuse, et rentrer au Maroc où on sera catégoriser Cheta7a … !
Elle m'a répondu, qu'elle croit au changement et qu'elle croit que nous le portons… que oui il faut vivre dans une bulle au Maroc pour vivre heureux, oui il faut apprendre à ne pas écouter l'avis de la voisine, oui il faut rouler en voiture et rigoler de la bêtise humaine, mais c'est chez elle… elle a porté la main au coeur en disant c'est "chez moi" , j'ai trouvé ça beau et émouvant mais moi-même si c'est chez moi ( main au coeur) bah pour qu'on s'aime restons éloignés .. je m'éloigne du sujet , revenons à Aïcha
Elle s'est associé au "bureau des arts" de l'école IDRAC PARIS pour donner des cours de street jazz, elle donne ses cours sur Paris tous les samedis : toutes les infos ici sur sa page facebook : link
Perso j'y vais le samedi 3 si vous voulez venir avec moi, ça coûte 10 euros et si ça me garantit des cuisses de rêve et bah moi j'irai j'irai … à bon entendeur !! et oui j'ai hâte de voir ce bout de femme en plein cours de danse, elle avait cette manière de parler de son "métier", cette passion, ces étoiles dans les yeux, qui me laissent croire qu'une heure et demi de street jazz avec elle ne sera que du pur bonheur…
et elle a eu la brillante idée de "danser les villes", c'est donc un ipod dans la poche, et un ami photographe sur les trousses qu'elle a parcouru Casablanca, à danser Ain diab, le feu rouge de Maarif, le roof top d'une maison de ville, les abattoirs de Casablanca, en plein Ramadan sous le regard amusé, et très souvent sous les insultes des marocains très compréhensifs de l'art de la photographie …. mais elle s'en foutait, elle dansait, le reste importe peu…
Elle parlait, touchait ses cheveux, s'exprimait avec ses mains, me racontait ses choix, sa relation avec sa famille, sa carrière, ses questionnements sur la vie, la religion, le monde.. tout ça, sans melo drame, elle me parlait de ses années chez Serge Alzetta à Nice, de ses spectacles de danse, du monde impitoyable de la scène parisienne, de sa grand mère taquine, de ses parents qui la soutiennent, et moi je la regardait, épatée par tant d'ouverture d'esprit, de calme dans la discussion, de lucidité et de maturité…. je la regardait , et je pensais qu'elle avait raison, qu'on porte le changement, qu'elle a raison quand elle dit que les écoles de danse au Maroc c'est une grosse arnaque, ça c'est sa critique, et sa solution à la critique? ouvrir son école , transmettre son énergie et essayer de changer les choses…
il y a ceux qui ralent ( moi), et ceux qui portent leur passion et portent le changement … Aïcha m'a l'air de faire partie de la deuxième catégorie ….
elle fait certes, partie des privilégiés, parce que se payer des études de danse, et être acceptée par sa famille n'est pas choses "facile" et "normal" chez nous, mais elle ne s'est pas prise la grosse tête pour autant … et le fait qu'elle en ait conscience fait qu'elle se defonse encore plus pour prouver que c'est par son travail qu'elle se trouve une place…
On s'est quitté une fois que je lui ai raconté ma vie, chouiné au sujet de mon corps, rigolaient aux éclats de mes histoires de mecs chelous, et de ses histoires de filles chelous…
Et je la regardait s'éloigner, de ce pas énergique, son rire résonnait encore dans ma tête et je ne pouvais m'empêcher de maudire toute ma famille de m'avoir habituée au pain blanc et au tajine qui baigne dans l'huile, et surtout d'avoir héritée de génétiques de merde… FML
Je vous laisse la découvrir en photos
Xo Xo
Une marocaine enchantée ..
Crédits Photos:
David Jouary
Mehdi Bouzoubaa